Quels sont les liens entre la crise du coronavirus et nos assiettes?

Par

Florian Blumer, Biovision

La pandémie du Covid-19 souligne combien l’agriculture industrielle est une menace croissante à de nombreux égards et notamment pour la santé humaine.

Ces dernières semaines, nombre d’entre nous ne sont pas allés comme d’habitude sur leur lieu de travail, nous avons eu moins besoin des repas à l’emporté à midi et plus du tout de possibilité d’aller au restaurant le soir. Peut-être que ces contraintes nous ont donné du temps (et l’envie?) de cuisinier, de faire du pain, et si on a un petit balcon ou un morceau de jardin, planter quelques légumes et herbes aromatiques. Les chiffres démontrent que nous sommes nombreux à avoir découvert que les réseaux de vente à la ferme ne sont finalement pas si éloignés de nos centres urbains et qu’il existe des boutiques de vente en vrac de produits locaux et souvent bio au coin de la rue.

Notre rapport à l’alimentation est bouleversé par cette crise, nous retrouvons une certaine proximité qui s’était un peu estompée ces dernières années et décennies à force d’industrialisation de la production, de l’essor des plats cuisinés et de l’accélération générale de nos vies quotidiennes.

Ce semi-confinement a généré beaucoup de privations – nous sommes impatients de revoir notre famille et nos amis, de nous déplacer et de nous retrouver dans les espaces publics avec ce déconfinement progressif. Mais revenir à la normalité « d’avant » n’est pas souhaitable en ce qui concerne notre relation à l’alimentation.

Un système vulnérable à de nombreuses crises

Notre système agro-alimentaire industriel actuel nous entraine déjà depuis longtemps dans une autre crise: il contribue de manière significative au changement climatique et a entraîné un déclin spectaculaire de la biodiversité. Le modèle d’agriculture intensive largement diffusé est un système sensible aux crises mondiales. Le changement climatique génère avec plus de fréquence des conditions météorologiques extrêmes qui entraînent le lessivage des sols, des problèmes de récoltes, et toute une série de conséquences jusqu’à la malnutrition et la faim. Ce modèle d’agriculture n’a pas apporté de solutions de long terme au problème de la faim dans le monde, au contraire: la faim dans le monde augmente à nouveau depuis quelques années et cette pandémie menace d’aggraver encore la situation (chiffres FAO).

La pandémie du Covid-19 met en évidence de nouveaux problèmes jusqu’ici peu considérés. La proximité avec les animaux sauvages et les élevages industriels pour la consommation de viande favorise en réalité depuis des années une augmentation des cas de transmissions entre animaux et humains. Le commerce et les déplacements humains mondialisés ont permis au nouveau virus de se diffuser en quelques semaines à travers le globe.

La consommation excessive de viande – et l’utilisation à grande échelle d’antibiotiques dans l’industrie de la viande – est l’un des facteurs centraux de la propagation des maladies infectieuses. Mais ce n’est pas le seul aspect de l’agriculture industrielle qui constitue une menace pour la santé humaine.

L’utilisation de pesticides de synthèse entraîne une résistance

L’utilisation à grande échelle de pesticides de synthèse entraîne de plus en plus fréquemment des résistances. Les ravageurs qui détruisent les cultures, mais aussi ceux qui propagent les maladies, s’adaptent de plus en plus et deviennent résistants par exemple aux insecticides de synthèse courants.

On soupçonne qu’une utilisation excessive de différents pesticides augmente le taux de cancer, conduit à des malformations congénitales et des troubles du développement chez les enfants et peut affaiblir le système immunitaire humain, le rendant sensible à la pénétration de parasites. Cet effet est particulièrement dévastateur pour des millions de petits agriculteurs dans des pays économiquement défavorisés avec des systèmes de santé fragiles.

Enfin, les grandes monocultures typiques de systèmes agricoles très industrialisés, favorisent la propagation des maladies, en raison de ce que l’on appelle « l’effet de dilution », en revanche, une biodiversité élevée contribue à diminuer le taux d’infection entre humains et animaux.

Einkaufssituation auf dem Bauernmarkt , Auswahl eines Apfels

Redécouvrons la valeur de la nourriture

Nous devons redécouvrir la valeur de chaque produit et service alimentaire dans la crise actuelle. Dans notre vision, des aliments sains sont produits par des êtres humains en bonne santé sans détruire les ressources naturelles. Un système alimentaire sain peut être en mesure de mieux se défendre contre les maladies infectieuses comme le Covid-19 – et idéalement freiner leur apparition et leur diffusion.

Nous sommes à un moment particulier qui nous ouvre de nouvelles opportunités. Nous devons essayer de garder quelques habitudes de ce semi-confinement: continuer à acheter des produits locaux dans des réseaux de vente à proximité, peut-être nous engager auprès de systèmes d’agriculture contractuelle de proximité. Une occasion de renforcer nos liens avec les productrices et producteurs, de mieux comprendre leurs réalités en partageant aussi un peu de leur travail.

Cette crise sanitaire n’a pas diminuer les tensions dans notre système alimentaire, au contraire, elles ont été exacerbées. Dans la « normalité d’avant » il y avait des millions de victimes de famine, de malnutrition et de mauvaise alimentation et ces problèmes n’ont pas disparu. Nous devons continuer à œuvrer pour transformer ce système agro-alimentaire vers davantage d’agroécologie et de durabilité. Nous ne pouvons pas continuer à temporiser et la situation actuelle est une opportunité à ne pas manquer.

 

Ce texte est basé sur les articles « Cette crise nous donne l’occasion de repenser et de panser nos liens à l’alimentation » publié dans l’hebdomadaire « Terre & Nature », écrit par Alessandra Roversi, notre responsable de la consommation durable et de la communication en Suisse romande et « Beyond Meat – the food on your plate and Covid-19 » écrit par Shruti Patel, notre gestionnaire de programme pour le Programme de communication avec les agricultrices et agriculteurs.

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